Discours du Premier ministre Jean Castex - Conférence des présidents d'université

Ce contenu a été publié sous le gouvernement du Premier ministre, Jean Castex.

Publié le 16/12/2021

Merci beaucoup, cher président, pour votre invitation.
Je salue évidemment la ministre Frédérique Vidal qui connaît bien je crois, la fonction de présidente d’université.
Mesdames et Messieurs les présidents, merci de m’accueillir.
Je salue aussi le Secrétaire général pour l’investissement, vous avez eu raison de le citer parce qu’il fait beaucoup pour vous, n’est-ce pas ? Et il a raison, nous l’y encourageons, nous l’aidons. Je salue aussi les directrices générales d’administration centrale du ministère.
J’ai immédiatement répondu favorablement à votre invitation, cher président. C’est vrai que c’est un anniversaire : 50 ans, ça se marque, mais comme vous l’avez dit, nous avons déjà établi depuis que je suis Premier ministre des relations que l’on va qualifier de suivies. La conférence des Universités était née en 1971. Évidemment, cela ne doit pas être tout à fait dû au hasard. On est à quelques encablures de 1968 où l’université et les étudiants ont vécu un rôle, comment dire, majeur. Et l’on comprend bien que dans les réformes qui avaient été, à l’époque, entreprises, les présidents avaient sans doute ressenti la nécessité de se structurer, de s’organiser.
Je ne sais pas si j’ai cité cette anecdote à Frédérique Vidal , mais après les événements de mai 68, le général de Gaulle avait demandé à Edgar Faure , ministre de l’Éducation nationale et en charge aussi de l’Enseignement supérieur, de faire évidemment les grandes réformes que la situation appelait. Il avait demandé à son cabinet de mettre en forme tous les objectifs qui étaient assignés. Les conseillers ont donc beaucoup travaillé, Monsieur le recteur. Il est allé voir le ministre de l'Éducation nationale avec le fruit du travail. Il fallait, une loi organique, plusieurs lois, des décrets interministériels, des arrêtés, etc. etc. Et Edgar Faure – et c’est là que l’on voit que les temps ont changé – aurait répondu : « Comme vous avez raison, nous allons procéder par circulaire non publiée au Journal Officiel ».
Les choses ont beaucoup évolué depuis 1971, Mesdames et Messieurs les présidents, mais l'Université française est restée tout de même fidèle à sa grande tradition, et nous nous devons de veiller à ce qu'elle le soit : lieux de recherche, lieux de formation et d'enseignement avec une tradition d'autonomie, d'intégrité qui doit rester la même par-delà les époques, me semble-t-il. Une université, évidemment, qui plus que jamais face à la massification, comme on dit, à l'arrivée d'un nombre d'étudiants toujours plus plus élevé et qui, vous l'avez dit aussi président, doit répondre à cet enjeu d'insertion dans son écosystème territorial, mais bien entendu également professionnel.
Cette capacité d'adaptation, je voudrais vous dire et commencer par cela, j'ai pu la mesurer depuis la survenance de la crise sanitaire qui, hélas, vous le savez, n'est pas terminée. Bien entendu, la ministre a été et demeure votre interlocutrice de droit commun, mais j'ai tenu très vite à suivre mon niveau, si je puis m'exprimer ainsi, les discussions d'abord pour évidemment vous témoigner de ma parfaite implication. Et puis, parce que j'avais bien conscience de la difficulté ou des difficultés spécifiques que rencontrait le secteur de l'enseignement supérieur pour faire face à cette pandémie.
Je voudrais commencer par vous adresser ma très vive gratitude. Je me permets d'y ajouter, président, les organisations étudiantes que nous avons évidemment aussi associées à ces exercices d'écoute et de concertation. Donc, vous dire vraiment la gratitude qui est la mienne, qui est celle du Gouvernement, qui est celle, bien sûr, de la ministre. Nous avons essayé de gérer ensemble, finalement, cette crise inédite, avec les universités, les grandes écoles, les CROUS, enfin, toutes les institutions qui concourent avec beaucoup de savoir-faire, beaucoup de courage et de détermination.
Vous le savez, l’un de nos motifs de fierté est que la France soit le pays qui a laissé le plus ouvert ces établissements d’enseignement. Malheureusement, ça n’a pas été complètement le cas pour les établissements d'enseignements supérieurs pour toutes les raisons que vous connaissez, mais ça a été le cas évidemment de l’enseignement primaire élémentaire et secondaire. Et je pense que nous avons ensemble tout fait pour assurer non seulement à chaque fois que cela a été possible, le maximum d’enseignements en présentiel, et veiller lorsque cela ne pouvait être le cas à ce qu’un lien soit toujours établi.
Vous l’avez parfaitement dit Monsieur le Président, les étudiants, la communauté universitaire en général, ont été particulièrement impactés. Nous le savons par cette crise sanitaire. Je vais revenir dans un instant sur la façon dont nous avons essayé de faire face, mais je suis parfaitement conscient que des difficultés de mille et une natures sont apparues. Et vous avez aussi répondu présent lorsque s’est dessinée la voie de sortie de cette crise sanitaire qui s'appelle la vaccination. Nous pourrions également parler des tests et de tant de choses qui nous ont réuni. Je suis parfaitement conscient des efforts que vous avez les uns et les autres déployés pour que les étudiants, vos personnels aussi bien sûr se vaccinent.
Nous avons des résultats en matière de vaccination qui sont à l'image du pays. La France est l’un des pays au monde qui a le plus vacciné – même si l'urgence est à la dose de rappel, parfois communément appelée troisième dose. Cela veut dire Mesdames et Messieurs, et notamment avec le contexte de cette cinquième vague, avec la perspective du variant Omicron, que plus que jamais, il faut vacciner. On ne sait pas tout encore sur ce nouveau variant. On sait qu'il est beaucoup plus contagieux. On sait qu'il n'est pas forcément plus dangereux. On ne sait pas encore tout sur sa résistance à la vaccination. Même si, comme moi, comme toute la Nation, nous aimerions que ces épisodes soient derrière nous, tant qu'il est là, nous devons lutter pied à pied. Il y a aussi des étudiantes et des étudiants qui sont éloignés du système de soins, c'est-à-dire qui ne se font pas vacciner. Là aussi, nous devons déployer tous les dispositifs à notre disposition pour aller vers ces populations et progresser encore dans le chemin de la vaccination.
Cette crise sanitaire a eu des conséquences économiques, sociales, psychologiques. C’est avec vous, je le dis aussi avec les syndicats étudiants et sur proposition de Frédérique Vidal , que nous avons bâti des dispositifs pour faire face à la crise. Nous poursuivons pour cette année universitaire 2021-2022 en cours les 20 000 tuteurs, les 1 600 référents étudiants dans les résidences Crous. Je m’étais rendu à Strasbourg au cœur de l’hiver et ce que j’y avais vu m'avait impressionné et rassuré. Les dispositifs que vous avez déployés, les échanges que nous avions eu à cette occasion montrent que la solidarité n’est pas un vain mot. Nous avons, vous le savez, gelé les droits de scolarité, les loyers des résidences en Crous, le repas à 1 euro puisque je parle des Crous que nous avions généralisés et maintenus à la rentrée pour les étudiants boursiers et en situation de grande précarité. Je l'évoquais également les mécanismes de gratuité pour les étudiants en souffrance psychologique. Et là aussi, j'ai bien vu qu’entre les services universitaires, le recours aux dispositifs dits de ville ou de droit commun, il y a certainement matière à progresser. Nous devons faire face à l'urgence, à la crise telle qu'elle est, prendre des décisions, vacciner, etc. Mais nous nous grandirons encore plus si nous savons de tout cela tirer des enseignements structurels. Puisque je parlais aussi des questions de revenu, de pouvoir d'achat qui sont d'actualités, je vous rappelle, que ces jours-ci l’indemnité inflation sera versée aux étudiants boursiers.
En matière d’évolutions structurelles, je pense également à tous les dispositifs d'enseignement en distanciel auxquels la crise sanitaire nous a conduits à recourir. Je pense au numérique, il faut que l’on soit aux avant-postes, y compris et surtout pour celles et ceux qui n'y ont pas accès. Il y avait déjà un plan numérique, avant même la crise sanitaire. Après celle-ci, nous avons constaté avec Frédérique Vidal la nécessité d'appuyer sur l'accélérateur. Dès mon arrivée en juillet 2020, alors que nous étions en phase de préparation du plan de relance, j'ai fait le choix de dégager plusieurs dizaines de millions d'euros pour permettre le développement de l'hybridation. Et vous y avez répondu en vous regroupant dans des consortiums. Nous avons donc pu avancer. A Poitiers nous avons marqué cette véritable accélération numérique pour notre éducation de la maternelle au supérieur, en y affectant là aussi des moyens additionnels. Il y avait eu 17 démonstrateurs de l’enseignement supérieur, que PIA4, je me tourne à nouveau vers Monsieur Boudy , avait financé à hauteur de 100 millions d’euros. Maintenant, j’ai demandé à ce qu’il y ait un état des lieux précis, un retex comme on dit, sur le numérique de la gestion de l'Enseignement supérieur dans la gestion de crise. On a fait de même pour l'Enseignement secondaire, qui a été préparé, bien sûr à partir d'échanges avec plusieurs d'entre vous. Cette mission d'observation et d'accompagnement sur la nouvelle stratégie numérique devrait nous rendre ses conclusions prochainement, dont là aussi, nous devrons tirer toutes les conséquences. Je suis prêt, madame la ministre, nous sommes prêts à consentir les investissements nécessaires.
Au-delà de la crise et au-delà des enseignements que l'on peut en tirer, la préparation de cette réunion, cher président, mesdames et messieurs, m'a donné l'occasion de faire un petit bilan, un petit point de ce que nous faisons, ce que l’État, ce que le Gouvernement, fait pour l'Enseignement supérieur et la recherche. Les deux sont indissociables. Vous êtes des établissements d'Enseignement supérieur et de recherches, et de recherches. J'ai regardé quelques chiffres comparatifs parce que très fort, qu'est-ce que cela veut dire ? Ça ne veut rien dire. Et d'ailleurs, les acteurs que vous êtes pourraient logiquement penser que le compte n'y est pas, et qu'il y en a jamais assez, sans doute aurez-vous raison, mesdames et messieurs ? Mais enfin, du coup, je vais objectiver tout ça. Quand je regarde ce qui s'est fait par le passé, je peux dire vraiment sans aucun problème que nous n'avons pas à rougir, et que nous faisons un investissement fort. Là aussi, je le relie à la crise. Sur l’innovation et de recherche en santé nous avons baissé la garde pendant 20 ou 30 ans. Le résultat ne s'est pas fait attendre, on n'a pas été présent dans la course au vaccin. Et cela dans une Nation comme la France, le pays de Pasteur. À un moment où au contraire nous avons absolument besoin de la science, du progrès, de l'innovation. Nous en avons besoin si je puis me permettre de manière un peu politique et idéologique, parce que visiblement, certains semblent en douter et qu'il y a, je ne sais pas si c’est une résurgence, il doit bien y avoir des historiens parmi vous ou j'ai plutôt envie de dire que c'est un classique, une réapparition de ce que certains appellent l'obscurantisme.
Oui, la science, le progrès, l’innovation sont extrêmement utiles lorsque, comme toujours, ils sont maîtrisés, contrôlés, soumis à des objectifs éthiques et démocratiques. Nous devons ensemble le revendiquer haut et fort, preuves à l'appui. Et surtout nous devons investir, réinvestir dans ces sujets. Depuis 10 ans, notre effort financier pour la recherche plafonnait à 2,2% de notre richesse nationale, bien loin des 3% fixés par la célèbre stratégie de Lisbonne qui, elle, date d'il y a 20 ans. Donc nous n'étions pas au rendez-vous. Ai-je besoin à vous de rappeler que la rémunération moyenne des chercheurs français dans l’écosystème est inférieure de 37% à la moyenne de l'OCDE en 2019, derniers chiffres connus. Si je devais donner deux indicateurs de ce sous-investissement que vous ne connaissez que trop bien sans doute, je retiendrais cela. Raison pour laquelle nous avons fait, je le dis, de la recherche une priorité nationale. Je n'oublie pas non plus que le PIA, la loi d’orientation et de réussite des étudiants, ça c'était au début du quinquennat, ont déjà permis de faire entrer, chère Frédérique, certains de nos sites universitaires dans le célèbre classement de Shanghaï. Mais me semble-t-il, et je vous le dis, l'une de mes fiertés en tant que chef du Gouvernement aura été d'avoir fait voter la loi du 24 décembre 2020, évidemment sur proposition de votre ministre, loi de programmation et de la recherche qui prévoit 25 milliards d'euros supplémentaires sur 10 ans alloués à la recherche.
L'objectif est clair : ce sont les fameux 3% de la stratégie de Lisbonne. Nous cherchons, je l'ai déjà dit, un choc d'attractivité des métiers de la recherche, évidemment qui passe par une revalorisation des salaires, qui veut voir émerger une nouvelle génération de jeunes scientifiques. Là aussi, j'entends que c'est encore insuffisant. Il s'agit d'une marche, on peut regarder devant, il y en aura d'autres, mais je constate quand même que dans de telles proportions jamais une marche comme celle-là n'avait été franchie.
Il y a eu beaucoup de littérature, beaucoup de demandes. Nous l'avons fait. Je rappelle de surcroît que cette revalorisation est le fruit d'une négociation sociale qui a débouché sur un accord qui a d'ailleurs été signé tant il est symbolique à mes yeux, à Matignon en ma présence, ce qui est rare dans un milieu on va dire professionnel. On n'est pas au niveau de l'interprofession, qui relève plutôt de l'interministérialité. Je devrais sans doute rappeler les apports concrets de cette loi de programmation, mais vous les connaissez. Ce que je veux retenir devant vous, c’est que du point de vue budgétaire, d’ici la fin du quinquennat qui approche, 1,2 milliard d’euros auront été investis, très précisément, 400 millions en 2021 et 800 millions dans la loi de finances pour 2022 qui a été votée hier soir. Si je globalise sur l'ensemble du quinquennat, la hausse des crédits budgétaires du MESRI est de 2,4 milliards d'euros, soit une hausse de près de 11 % depuis 2017. On avait détaillé là tous les chiffres, je ne veux pas vous infliger tout ça, mais il ne faut pas non plus l'oublier. J'ai l'habitude de dire ici comme ailleurs que l'amour c'est bien mais que les preuves d'amour, c'est mieux.
Et il y en a. Je citerais à nouveau, cher Monsieur Boudy , le quatrième volet du PIA. Je n'oublie pas le plan de relance. Et puis France 2030 pour montrer que, et évidemment, je m'adresse à des universitaires, c'est le temps long qui est aussi intéressant que la conjoncture. Le plan de relance, vous l'avez cité, monsieur le président. Il y a le volet de rénovation énergétique des bâtiments universitaires. Un sujet important, peut-être plus logistique mais je pense que c'est très noble. Voyez dans quel état se trouve le patrimoine de L’État et les universités et d'autres établissements publics. J'ai eu évidemment une forte demande. Nous avons fait un choix politique que j'ai arbitré, à la joie de Mme Vidal , à la moindre joie d'autres ministres. Cela aussi, c'est très mesurable et très concret. Les établissements d'enseignement supérieur ont eu une très grosse part de ce gâteau. Et j'ai voulu le faire d'abord parce que je pense que c'est encore une fois cohérent avec tout le reste. J'ai voulu aussi le faire parce que ces décisions étaient concomitantes de l'arrivée de la deuxième vague de la pandémie. Pour le coup, le fond, c'est-à-dire les objectifs de long terme, coïncidait avec le moment et les exigences du court terme.
Je pourrais aussi évoquer puisque je parle de la crise, les créations de places que nous avons faites dans les établissements d'enseignement supérieur sur proposition de la ministre. Si je ne me trompe, 10 000 places en plus en 2020 et 20 000 à la rentrée universitaire 2021.
Je voudrais aussi vous dire les efforts que nous faisons pour l'insertion professionnelle des jeunes. Alors, pardonnez-moi, tous les jeunes, pas que les étudiants, mais les étudiants aussi. Et voyez en particulier, vous le savez, nous avons, parce que j'y crois depuis longtemps et je ne suis pas le seul, beaucoup développé l'apprentissage et l'insertion par l'alternance. Et combien, là aussi, ça n'était pas évident Monsieur le président. Lorsque l’on m’a dit : « ah oui, mais il y a beaucoup de gens issus de l’enseignement supérieur qui vont bénéficier de ce dispositif », j’ai dit « il faut y aller ». Il n’y a pas de raison de limiter les primes en fonction du niveau de diplôme. Et ils en bénéficient, et c’est normal, de façon extrêmement élevée, y compris, en ce moment, nous avons les derniers chiffres.
Le résultat, je vous le dis, à vous, présidents des universités est là. Lors de la dernière grande crise qu’a connue la France, c’était la crise de 2008-2010, nous avions eu une explosion du chômage et une explosion du chômage des jeunes en particulier, +31 %. C’est toujours les plus fragiles qui sont, en période de crise, les premières victimes : les chômeurs de longue durée, les jeunes, etc., dans un pays où vous le savez le chômage des jeunes est structurellement plus élevé que chez certains de nos voisins. Grâce à tous ces dispositifs, je revendique devant vous que grâce au plan 1 jeune 1 solution, grâce à l'apprentissage dont je viens de parler, grâce à la qualité des efforts d'insertion professionnelle que vous avez consenti et qui, je le sais et je le souhaite, sont au centre de vos priorités, le chômage des jeunes, qui avait fortement augmenté à la faveur de la crise, est déjà revenu à ce qu'il était en décembre 2019. Et notre objectif, évidemment, est de le faire baisser.
Vous voyez ainsi qu’aujourd'hui, grâce à la relance, en général, le taux de croissance de la France pour l’année 2021 qui se termine, est vraisemblablement de 6,7 %, soit le plus élevé dans la zone euro. Le chômage est même inférieur à ce qu’il était avant la crise. Nous avons le taux de création d'emplois le plus dynamique depuis 12 ans, au point même que notre difficulté est de les pourvoir.
Je reviens à l'avenir, à la recherche. Nous avons, vous le savez, engagé grâce aux moyens déployés, une vingtaine de programmes prioritaires de recherches pour plus d'un milliard d'euros qui vont financer la recherche dans des domaines déjà bien identifiés : le quantique, l'hydrogène ou encore les biothérapies, mais aussi, je le souligne, des domaines plus exploratoires, comme par exemple les futures technologies de stockage des données. Or, là-dessus, quand je parle de recherche, nous avons toujours un écosystème où l’on est nombreux sans que cela soit toujours très fluide.
Notre rôle, notre mission, je parle de celle de l’État, est d'avoir une stratégie cohérente, d’avoir largement de la place pour tout le monde, de faire travailler tous les acteurs ensemble. La recherche est indépendante, vous l'avez rappelé. Elle exige, je suis tout à fait d'accord avec vous, Monsieur le président, la liberté intellectuelle, mais ensuite dans son organisation, évidemment, elle suppose, vous le savez bien, des coopérations. Je le dis à chaque fois que l'occasion m’en est donnée, il faut que nous travaillons ensemble. Il faut que cet écosystème de la recherche travaille de plus en plus de façon intégrée en recherchant des synergies.
Vous avez évoqué le programme Excellence, annoncé récemment. C'est un message fort. L'excellence prend des formes justement multiples, et nous avons à cette occasion souligné le rôle essentiel, Mesdames et Messieurs les présidents, que jouent les établissements d'enseignement supérieur et de recherche au sein de leur territoire. Nous avons dit notre volonté de les soutenir dans la définition de leur signature propre, si je puis m'exprimer ainsi. Et j'en profite pour dire, j'ai directement par le recours de quelques élus et des territoires que de nouvelles vagues, n'est-ce pas, Monsieur le secrétaire général, nous permettront bientôt d'accroître la liste des lauréats.
Puisque je parle aussi de décloisonnement, d'ouverture, permettez-moi de vous adresser mes remerciements à nouveau, sur un tout autre sujet que vous avez évoqué en parlant de la venue ici. Je vais faire allusion à la réforme assez importante que nous sommes en train de conduire sur la formation et le recrutement des cadres dirigeants, des cadres supérieurs, comme on dit de L’État. D’ailleurs, ça vous concerne à beaucoup de titres parce que l’idée est de permettre une élévation de la qualification de la formation initiale, de la formation continue de ces cadres et de permettre même aussi le plus de brassage possible dans des employeurs différents. Je le rappelle toujours, je renvoie à la lecture de l’ordonnance 1945, par laquelle le général de Gaulle et Michel Debré ont créé l’ENA, l’interministérialité, tout au cœur de ce texte. Elle avait été perdue de vue avec des régimes indemnitaires extrêmement différents. Le fameux INSP, ce n'est pas simplement pour le plaisir de changer de nom. Il aura notamment deux objectifs. D'abord, de ne pas prendre en compte que la formation initiale et le recrutement du haut fonctionnaire, mais bien également la formation tout au long de la vie. Il faut aussi que nos qualifications évoluent. Ce n'était pas complètement et en tout cas pas assez le cas. Et puis, dans cette formation nous voulons, pardonnez-moi cette formule, « l'universitariser », avec des d'enseignants permanents, avec des disciplines qui ne soient plus que strictement juridiques ou économiques, qui fassent davantage appel aux sciences sociales. Bref, dans la création de l'INSP, mais je pense qu'Amélie de Montchalin a su vous l'expliquer, nous voulons ouvrir des ponts beaucoup plus importants qu'ils ne le sont aujourd'hui avec l'université française.
J'ai pour cela besoin de vous, Mesdames et Messieurs les présidents, Monsieur le Président, pour relever ce défi ou plus exactement réussir l'objectif qui est le nôtre.
Puis, il y a donc France 2030, rassurez-vous, j'ai bientôt fini, mais j'ai beaucoup de choses à vous dire. Il y a bien sûr dans tout cela du keynésianisme quelque part. On réinjecte pour éviter une dépression, encore une fois avec des résultats. Mais tout de suite, il faut penser à plus loin, sinon on ne ferait pas notre travail. Je ne vais pas vous redécrire le plan France 2030, mais l'université et la recherche font partie clairement des priorités et des moyens affectés.
Pour terminer, je voudrais, simplement parce qu'ils sont dans l'actualité, vous partager trois éléments.
Le premier, c'est l'accompagnement des sites dans le soutien à l'innovation. Il faudra y revenir parce que c'est très important. On est sur le sujet des transferts de technologies de valorisation et vous avez fait déjà des avancées considérables. C'est pour tout cela que j'ai souhaité que les opérations dites de pré-maturation et de maturation des inventions produites dans vos laboratoires puissent être soutenues financièrement lorsqu’elles s’inscrivent, évidemment dans les thématiques stratégiques prioritaires de l’État. C’est pourquoi je vous annonce que l’ANR va publier, peut-être le savez-vous, aujourd’hui même un appel à propositions qui vous donnera l’opportunité de disposer, vous les universités, mais aussi les organismes de recherche en vous appuyant sur vos dispositifs de valorisation, notamment les SATT, d’un levier supplémentaire pour réaliser des preuves de concept, des changements d’échelle, consolider les portefeuilles de propriétés intellectuelles, mieux vous positionnez par rapport à vos concurrents. Bref, pour apporter des technologies et des services pertinents à nos acteurs économiques et favoriser, vous le savez que c’est aussi une de nos priorités, les startups dites prometteuses.
Outre cette priorisation dans le résultat des investissements de l’État, le Gouvernement va en deuxième lieu aider les établissements d'enseignement supérieur à consolider et même à accroître, si possible, leurs ressources propres en complément des financements qu'ils apportent. Concrètement, cela veut dire que l'État lance aujourd'hui un appel à projets qui permettra aux lauréats de se renforcer sur le montage de projets, par exemple de financer pendant quelques années une équipe dédiée à la recherche de financements. Alors, bien sûr, on va trouver ces sous. Je pense évidemment aux financements européens ainsi qu'à ceux dédiés à la formation tout au long de la vie ou au mécénat. J'ajoute que la loi 3DS, actuellement en discussion à l'Assemblée nationale, permettra aux universités et aux Crous de mieux gérer et surtout de valoriser leur patrimoine en participant au capital de société. Cela leur permettra de bénéficier de l'allègement des contraintes de calendrier et des coûts compte tenu du régime de quasi régie qui leur est applicable dès lors qu'elles sont détenues à 100 % par des personnes publiques. Je sais, Monsieur le président, que c'était une demande forte et ancienne de la CPU. Je sais aussi, pour différentes raisons, qu'elle n'avait malheureusement pas pu aboutir dans le projet de loi de finances pour 2020. La loi n'est pas encore votée, mais nous espérons que ce texte permettra d'y donner suite.
L'investissement pour les universités de France 2030 vise aussi, c'est un point très important et c'est la troisième priorité que je voulais vous faire partager, à savoir faire émerger des compétences pour tous les métiers d'avenir, soutenir l'émergence de talents et accélérer l'adaptation des formations aux besoins de compétences des filières et des métiers d'avenir. J'ai évoqué tout à l'heure les difficultés de recrutement, les tensions sur le marché de l'emploi.
Vous le savez, nous avons doté cet objectif dans France 2030 sur décision du président de la République de 2,5 milliards d'euros. Nous lançons aujourd'hui un premier appel à projets sur ces enjeux pour construire les formations de demain, avec l'ambition d'anticiper autant que possible et de contribuer à satisfaire les besoins en emplois ou en compétences, que ceux-ci, d'ailleurs, soient sanctionnés par des titres, des certifications ou des diplômes. D'autres appels à projets viendront sur l'intelligence artificielle, sur la santé et d'autres sujets. Et là encore, je voudrais après vous, monsieur le Président, remercier vivement le secrétaire général pour l’investissement pour son rôle indispensable à la bonne réussite de ces programmes.
Monsieur le président, Mesdames et Messieurs, je veux conclure mon propos en évoquant la Présidence française de l’Union européenne. Nous avons eu hier à l’Assemblée Nationale, un débat sur ce sujet. Le président de la République a présenté devant la Nation les orientations majeures de cette présidence qui commencera donc le 1er janvier prochain. C’est un moment pour nous extrêmement important. La France est l’un des pays fondateurs. Les présidences maintenant, puisque nous sommes 27, sont rares, tous les 13 ans. Nous l'avons donc préparée avec beaucoup d'attention et de soins, d'autant que nous savons que nous sommes attendus. Il faut, je le dis, je le revendique, je l'assume devant vous, que ce soit un moment fort pour faire progresser l'Europe, et pour expliquer à tous nos concitoyens, à tous nos acteurs économiques, à toutes nos universités que nous avons besoin d'Europe. Nous avons d'abord besoin d'Europe parce que c'est l'ouverture, parce que c'est le respect des autres, c'est la recherche de compromis, c'est le travail ensemble. La Présidence française se doit aussi d’être la célébration d'un certain nombre de valeurs, au-delà de politiques, d'outils, de techniques, de sujets très concrets. Évidemment qu'ils la caractériseront sur tous les plans. Et évidemment, les universités, les étudiants, les échanges, les coopérations, la recherche n'ont pas de frontières, et doivent être aussi au cœur de cette présidence au moment où vous le savez, 2022 sera par ailleurs l'année de la jeunesse. Le président de la République s'était déjà exprimé dès 2017 à la Sorbonne sur cette Europe des universités.
Nous devons faire progresser ces chantiers de la façon la plus concrète, mesurable pour tous nos étudiants, pour tous nos chercheurs, pour tous nos enseignants. Des initiatives sont prévues, j'ai besoin, mesdames et messieurs les présidents, monsieur le président de la CPU, de votre soutien pour cela. Et je sais qu'il est acquis. Il y a des rendez-vous d'ores et déjà programmés. Nous avons tout intérêt à ce qu'il se traduise par des avancées mesurables, visibles pour nos étudiants et pour nos concitoyens.
Je le dis, ici devant vous, de la même façon que nous avons besoin d'une Europe forte pour faire une France forte, ainsi que je l'ai indiqué devant la Représentation nationale hier, la France a besoin d'universités, d'établissements d'enseignement supérieur très forts, bien gérés, performants, ouverts sur leur territoire, sans complexes, réservant à leurs étudiants le meilleur accueil possible, travaillant à leur insertion professionnelle, bien positionnés sur la recherche. Je l'ai dit, il s’agit évidemment de questions de souveraineté. Il s’agit aussi de questions liées, je n'hésite pas à le dire, à la compétitivité de la maison France. Mais ce sont aussi, je sais que vous le mesurez parfaitement, notamment, par les temps qui courent, des questions relatives à notre pacte républicain.
Je vous remercie beaucoup.

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