Compte rendu du Conseil des ministres du 08 mars 2023
Olivier VÉRAN
Mesdames, Messieurs, il y a 5 ans encore, si je me tenais
devant vous, ce serait pour vous annoncer qu’hélas le chômage a encore
augmenté. Je commenterais la destruction des emplois, la délocalisation des
usines. Je vous parlerais de nécessaires réformes à adopter pour inverser la
courbe du marasme économique. Je vous parlerais des mécanismes de protection
que nous devrions mettre en place, très coûteux, pour venir en aide à des
millions de Français sans emploi.
Aussi, permettez-moi de commencer mon intervention
en savourant, avec vous, les excellents résultats économiques enregistrés ce
mois-ci encore. Le chômage continue de refluer vers le cap du plein emploi.
Nous avons réimplanté près de 80 usines dans notre pays, en 2022, signe que la
dynamique de la désindustrialisation s'est bien inversée : ce sont plus de
30 000 emplois nouveaux qui ont ainsi été créés. Nous venons de battre le
record historique du nombre d'apprentis dans notre pays : plus de 830 000. Et
les investissements étrangers, sur notre territoire national, ont augmenté de
10 %.
Pourquoi je vous dis cela ? Parce que, aux antipodes d'un pays qui serait
réputé irréformable, nous avons pris nos responsabilités depuis 5 ans en vous
faisant une promesse. Il n'y a pas de fatalité au chômage, dès lors qu'on s'en
donne les moyens. L'emploi, c'est la première des solidarités et c'est l'emploi
qui sort les gens de la pauvreté et qui fait reculer les inégalités.
Alors,
aujourd'hui, la promesse que nous faisons, c'est celle d'équilibrer
financièrement notre modèle social, celui qui positionne la France sur le
podium mondial des nations les plus redistributives. Équilibrer notre modèle
social, c'est aussi équilibrer notre système de retraite par répartition. Notre
objectif, vous le connaissez, un régime équilibré à l'horizon 2030, alors que
la population vieillit, alors qu'il y aura de moins en moins d'actifs pour
pouvoir financer les pensions des actuels retraités. C'est pour cette raison
que nous vous demandons de travailler progressivement un peu plus longtemps.
C'est pour cette raison que nous défendons notre projet de loi retraites au
Parlement. Et nous le faisons avec le souci de la justice et dans le dialogue.
Alors oui, nous avons conscience que cet effort demandé aux Français n'emporte
pas une majorité, l'adhésion d'une majorité de Français. Mais nous sommes
convaincus que les alternatives : augmenter les impôts, augmenter la dette,
baisser les pensions des retraités, n'emporteraient pas davantage l'adhésion de
l'opinion.
Et surtout, je le redis ici, la porte du Gouvernement, elle, reste
ouverte, comme elle est restée ouverte tous ces derniers mois. C'est du
dialogue et c'est dans le dialogue qu'ont germé des avancées importantes pour
les Français. C'est dans le dialogue, toujours, avec les parlementaires de la
majorité et des oppositions cette fois, que nous continuons de faire évoluer
notre projet.
Par exemple pour mieux valoriser les retraites des femmes qui ont
eu à conjuguer maternité et vie professionnelle. Parce que c'est juste, parce
que cela ne remet pas en question l'équilibre à 2030, dès lors que nous le
compensons. Le blocage, c'est l'inverse du dialogue. Le blocage, ça n'amène pas
de progrès. Le blocage, ça pénalise les Français qui veulent travailler et se
déplacer. Nous entendons le message des manifestants. Nous respectons les
désaccords qui s'expriment dans la rue ou par la grève. En revanche, nous
condamnons les tensions, les violences parfois qui ont pu émailler certaines
manifestations hier, comme nous condamnons les coupures volontaires de courant
qui ont pu conduire à évacuer ici, un tribunal, là une université. Et nous
condamnons les discours qui appellent à mettre notre économie à genoux, parce
que ces discours-là sont irresponsables, parce que la seule chose que nous
voulons mettre à genoux, c'est le chômage. Nous restons donc ouverts, désireux
même, de dialoguer.
Et dans le même temps, nous respectons nos institutions. Le
Parlement a toute légitimité pour examiner, amender, adopter notre projet de
loi. Le blocage n'a pas davantage sa place au Sénat qu'il ne l'avait à
l'Assemblée nationale. Et c'est le message qui a été envoyé, la nuit dernière,
par les sénateurs de la majorité sénatoriale qui, face aux velléités
d'obstruction des sénateurs de la NUPES ont pris leurs responsabilités pour
avancer dans le texte, en vue d'adopter, nous l'espérons ce jour, le fameux
article 7 qui entérine le passage de 62 à 64 ans.
J'en viens maintenant aux
textes qui ont été présentés en Conseil des ministres. Le ministre chargé du
Travail a présenté un projet de loi qui ratifie une ordonnance relative à
l'apprentissage transfrontalier. C'est un texte qui ne modifie pas l'ordonnance
et qui vient valoriser cette voie d'accès à l'emploi par le biais de la
coopération transfrontalière.
Le ministre de la Santé et de la Prévention et la
ministre des Sports ont présenté ensuite un décret qui parle de l'habilitation
des Maisons sport santé. Ce sont des établissements précieux pour démocratiser
le sport, promouvoir l'accès à l'activité physique et sportive à des fins de
santé. L'objectif de 2017, fixé par le président de la République de 500
établissements, est largement dépassé puisque aujourd'hui, il y a plus de 570
Maisons sport santé dans tout le pays. Et par ce décret, le Gouvernement
souhaite passer à une logique territoriale et qualitative pour améliorer le
service rendu à la population. Et ce, notamment face à une certaine urgence
sanitaire, puisqu'aujourd'hui plus d'un Français sur deux est en situation de
surpoids.
Enfin, la Première ministre et la ministre en charge de l'Égalité
entre les femmes et les hommes ont présenté le plan Égalité 2027 entre les
femmes et les hommes, puisque vous le savez, l'égalité entre les femmes et les
hommes, c'est la grande cause des deux quinquennats.
Ce que je vous propose, c'est
d'abord de prendre vos questions sur tous les sujets d'actualité et ensuite je
laisserai la ministre déléguée présenter le plan et répondre aux questions
spécifiques en cette journée du 8 mars.
Marie CHANTRAIT
Monsieur le ministre. Bonjour, Marie CHANTRAIT pour TF1/LCP.
Vous l'avez dit dans votre introduction, la porte du Gouvernement reste
ouverte. Mais soyons plus précis, suite notamment aux demandes de
l'intersyndicale hier, demandant à être reçu par le président de la République,
précisant aussi que le silence aujourd'hui du chef de l'État constitue un grave
problème démocratique. Le chef de l'État en Conseil des ministres a-t-il évoqué
cette question et recevra-t-il les syndicats dans les prochains jours ou
proposera-t-il que sa Première ministre ou le ministre du Travail le fasse à sa
place ? Merci beaucoup.
Olivier VÉRAN
Je vais peut-être vous rappeler le déroulé des épisodes
précédents. Dès le mois de juin, le président de la République a proposé de
recevoir les syndicats, presque tous sont venus, la CGT n'est pas venue. Par la
suite, le président de la République a convié l'ensemble des forces vives de la
nation, dont les corps intermédiaires, c’est-à-dire les syndicats, autour de la
table du Conseil national de la refondation pour aborder, au-delà du sujet des
retraites, toutes les urgences et toutes les préoccupations quotidiennes des
Français. La CFDT est venue, la CGT n'est pas venue. Le président de la
République, il respecte les institutions. Et aujourd'hui, c'est le temps
parlementaire qui a cours. Quand le texte a fini son cheminement à l'Assemblée
nationale et avant qu'il n'arrive au Sénat, le président de la République a
effectué lui-même des déplacements, souvenez-vous, à Rungis notamment, où il a
été amené à s'exprimer sur la question de la réforme des retraites.
Aujourd'hui, le texte est au Sénat. Et dans le respect de nos institutions et
de la légitimité démocratique que nous conférons au Parlement, il est normal de
respecter le déroulement. Le Président a confié à la Première ministre et aux
membres du Gouvernement la charge de mener la concertation avec les forces
politiques, avec les forces syndicales dans ce pays, ce que nous faisons depuis
des mois. Et d'ailleurs, je le redis, avec à chaque fois la possibilité
d'améliorer, d'amender le projet de loi pour y introduire des éléments de
justice, de progrès et d'équilibre. Quand je dis que la porte du Gouvernement
reste ouverte, c'est que nous n'avons jamais voulu rompre, à aucun moment, le
fil de l'échange, du dialogue et de la discussion, même si on acte un désaccord
sur un des aspects du projet de loi. Et donc, notre porte reste ouverte et
chacun est à la manœuvre, au rôle qui lui revient d'occuper dans le respect de
nos institutions.
Simon LE BARON
Je rebondis sur cette question.
Olivier VÉRAN
Je m'en doutais.
Simon LE BARON
Eh oui, bonjour. Simon LE BARON pour France Inter. Pour
qu'on comprenne bien, quand vous dites : la porte du Gouvernement reste
ouverte, ça veut dire que celle de l'Elysée est fermée pour l'instant aux syndicats
?
Olivier VÉRAN
Mais ça ne veut pas dire qu'il y a une porte fermée. Je vous
dis que nos institutions prévoient que c'est le Gouvernement qui est à la
manœuvre pour faire adopter un projet de loi par le Parlement et qu'il se
trouve qu'aujourd'hui le Parlement se réunit pour examiner le projet de loi. Et
il se trouve que le Gouvernement a toujours dit qu'il était ouvert et que sa
porte était ouverte et que nous souhaitions rester dans le dialogue avec les
syndicats, avec les forces vives de la nation. Donc, on est vraiment dans le
strict respect des institutions telles qu'elles sont prévues. Je peux vous le
redire une troisième fois si vous le souhaitez.
Journaliste
Bonjour Adrien (inaudible) France Info. Quand vous parlez de
“portes ouvertes” et pardon d'y revenir encore, mais une porte ouverte pour
faire quoi, finalement ? Parce que si c'est juste pour… Sachant que vous ne
voulez pas revenir sur les 64 ans, les syndicats veulent revenir sur les 64 ans
et le retrait de la réforme. Donc, vous pourriez discuter de quoi, de la suite
ou simplement une discussion de politesse ?
Olivier VÉRAN
Et de quoi nous avons discuté avec les syndicats pendant des
mois…
Journaliste
Mais le texte au Parlement.
Olivier VÉRAN
Au-delà de la question du désaccord sur les 64 ans ? On a
parlé de la pénibilité, c'est pour ça qu'on met 1 milliard d'euros dans un
fonds de prévention de la pénibilité. On a parlé des travaux, des gens qui
avaient fait des travaux d'utilité collective, qui n'étaient pas reconnus pour
cotiser à la retraite. Nous avons parlé de nouveaux droits pour les personnes
en situation d'invalidité, nous avons parlé des carrières longues et nous
voulons continuer de parler avec les syndicats, de travailler avec eux, aussi
pour l'après. Parce que nous l'avons dit, il y aura un texte qui parlera du bon
emploi, du plein emploi. Il y aura beaucoup d'éléments qu'il nous faut aborder
avec les syndicats, donc on veut pouvoir continuer. Vous savez, ce n'est pas
parce qu'on acte un désaccord sur un point, certes majeur, je peux l'entendre, que
pour autant, les discussions s'arrêtent sur l'ensemble des thématiques. Donc on
veut continuer d'être dans ce dialogue réciproque.
Francesco FONTEMAGGI
Bonjour Francesco FONTEMAGGI pour l'AFP. Je reviens sur la
porte ouverte. Est-ce que vous pouvez nous dire clairement que le Président n'a
pas prévu…
Olivier VÉRAN
La couleur de la porte ?
Francesco FONTEMAGGI
… le Président n'a pas prévu de recevoir les syndicats en
urgence. Premièrement, c'est quand même ça la question des syndicats. Donc,
est-ce que, oui ou non, le Président a prévu de recevoir les syndicats en
urgence ? Et deuxièmement, comme le demandait Marie tout à l’heure, est-ce que
la Première ministre ou le ministre du Travail vont proposer un rendez-vous
clairement au syndicat ou alors, c’est à eux de prendre l’initiative, comment
ça se passe ? La porte est ouverte mais concrètement, qui organise quoi ?
Olivier VÉRAN
Mais d’abord, il faut savoir que le dialogue n’a pas été
interrompu avec les syndicats. Vous vous êtes vous-même fait l'écho du fait que
la Première ministre s’était entretenue, c'était un week-end, il y a pas si
longtemps que ça, avec les responsables syndicaux, pour parler avec eux de
l'actualité retraite et aussi parler de la suite. Donc, on reste dans cette
volonté d'échanger avec eux. Voilà. Et je vous le redis encore une fois, on
respecte nos institutions. Quand le président de la République intervient au
moment où un texte est examiné au Parlement, vous dites : mais est-ce qu'il est
à sa place pour intervenir à ce moment-là, alors que c'est le Parlement, il y a
la séparation des pouvoirs, etc… On reste vraiment dans quelque chose qui est
connu, dans notre cinquième République. Vous avez les sénateurs qui se sont
réunis jusqu'à 3h00 du matin, qui vont continuer. Ils sont légitimes pour le
faire d'examiner ce texte. Et à côté de cela, le Gouvernement dont c'est le
rôle, reste en interaction avec les partenaires sociaux et les forces vives de
la nation.
Journaliste
Donc, concrètement, il n'y a pas de rendez-vous proposé ?
Olivier VÉRAN
Je vous ai répondu 4 fois.
Sébastien KREBS
Bonjour. Sébastien KREBS, RMC. Je change de sujet. Gabriel
ATTAL va présenter un plan de lutte contre la fraude. Il en a parlé ce matin
sur RMC, BFMTV, en évoquant une piste de durcir les règles et de demander de
permettre à l'Etat d'avoir accès aux données des compagnies aériennes pour
contrôler les voyages des bénéficiaires des minima sociaux. Est-ce que ça ne
pose pas un problème en termes de données personnelles, en termes de libertés ?
Et en termes de message, quel message ça renvoie ? Est-ce une forme de flicage
et de chasse aux pauvres ?
Olivier VÉRAN
Pardon, mais le problème, c'est la fraude. Il y a de la
fraude, il y a de la fraude fiscale, il y a de la fraude sociale dans notre
pays et je crois que personne ne considère que la fraude est un mal auquel nous
devrions nous habituer avec une forme de fatalité. Et d'ailleurs, nous luttons,
de plus en plus efficacement, contre toutes les formes de fraude. Le ministre
des Comptes publics a eu l'occasion de présenter des chiffres qui montraient
qu'il y avait une progression du recouvrement sur fraude. Et je crois que les
Français qui cotisent, qui paient leurs impôts attendent légitimement que ces
impôts, ils soient utilisés à bon escient et pas détournés par une partie
d'entre eux, quels que soient les moyens de détournements. Nous constatons
aujourd'hui qu'il y a des règles en vigueur dans notre pays pour percevoir
certaines prestations sociales qui sont corrélées à un nombre de mois que vous…
pendant lesquelles vous résidez en France, et qui sont variables d'une
prestation à une autre. Je crois que c’est… Je ne veux pas dire de bêtises,
mais je crois que c’est 8 mois pour les APL, c'est 9 mois pour le RSA, c’est 6
mois pour le minimum vieillesse. Donc, d'abord, nous souhaitons pouvoir engager
la voie d'une harmonisation, c'est-à-dire que nous jugeons normal d'exiger de
la part de personnes qui perçoivent des prestations sociales de la part de la
France qu'ils puissent attester, qu'ils résident au moins 9 mois par an sur le
territoire national. Et ensuite, quand il y a de la fraude, mais écoutez, il
faut aller la traquer, la fraude, dans le respect évidemment des libertés
individuelles et collectives. Mais le meilleur moyen pour être sûr qu'une
personne remplit bien les conditions de résidence sur notre territoire
national, ça reste quand même de nous appuyer sur des moyens très pratiques,
comme par exemple les données des compagnies aériennes. Donc, ça ne revient pas
du tout sur la capacité des gens à se déplacer. Ça nous permet juste d'être
plus efficace, à l'instar de ce que font beaucoup de pays et qui nous entourent
avec une efficacité certaine pour lutter contre la fraude. Je vous redis notre
engagement pour lutter contre toutes les fraudes.
Sébastien KREBS
On sait combien de bénéficiaires des minima sociaux sont à
l'étranger et pourraient percevoir indûment ces minimas ?
Olivier VÉRAN
Combien le percevrait indûment, par définition, si on le
savait avec précision, bien ça voudrait dire qu'on pourrait individualiser les
situations et donc, on n'aurait pas besoin de nouveaux outils. Par contre, je
crois que la CAF a déjà communiqué sur plus, près de 3 milliards d'euros par an
de fraude sociale, dont une partie est liée au non-respect des conditions de
résidence. Ça veut dire que vous avez sans doute des gens qui perçoivent des
prestations sociales comme s'ils résidaient en France, majoritairement, alors
qu'en réalité, ils passent le plus clair de leur temps et de leur année à
l'étranger où ils ont, c'est leur droit, élu résidence. Mais s'ils ont élu
résidence à l'étranger et qui ne respectent plus les règles nécessaires pour
percevoir, en retour, des prestations sociales, mais écoutez, il faut qu'on
puisse l'identifier avec plus d'efficacité.
Quentin CHATELIER
Bonjour, Quentin CHATELIER, Liaisons sociales. Je reviens
sur le texte sur le plein emploi auquel vous avez fait référence. Est-ce qu'un
calendrier a été fixé pour l'examen du texte et sa présentation, et est-ce
qu'il est possible que cet examen suive directement le débat sur la réforme des
retraites, comme le demandent certains députés, notamment de la majorité ?
Merci beaucoup.
Olivier VÉRAN
Sur le plein emploi, pardon, excusez-moi ?
Quentin CHATELIER
Oui, le texte sur le plein emploi.
Olivier VÉRAN
Oui, vous me demandez, est-ce qu’il y aurait une concertation
?
Quentin CHATELIER
Non. Est-ce qu'un calendrier a été fixé ?
Olivier VÉRAN
Est-ce qu’un calendrier a été fixé ? Alors, il n'y a pas
encore de… Je ne peux pas vous donner encore un calendrier. Ce qui est sûr,
c'est que la réflexion, elle a commencé depuis un moment puisque dès le mois de
décembre, se sont ouvertes les Assises du travail, qu'il y a un travail de
concertation qui est conduit par le ministère en charge, le ministre du Travail
sous l'égide de la Première ministre. Et donc, on aura l'occasion de
communiquer bientôt sur le calendrier. Mais c'est un texte qui suivra de façon
relativement proche.
Quentin CHATELIER
Très bien. Merci.
Journaliste
Adrien (inaudible) à nouveau. Une fissure a été découverte à
la centrale de Penly. L'IRSN parle d'un problème sérieux. Comment vous
réagissez à cela d'abord, et est-ce que cela peut remettre en cause, enfin,
est-ce que vous vous inquiétez d'une possible remise en cause de la
réouverture, peut-être de certains réacteurs ?
Olivier VÉRAN
Tout d'abord, on ne fait aucune concession sur la sûreté en
matière nucléaire, ça c'est très clair, ni sur la transparence. Et d'ailleurs
EDF a communiqué en transparence après avoir qualifié cette information
nouvelle. L'Autorité de sûreté nucléaire a exigé d'EDF de revoir la stratégie
de réparation pour les réacteurs, similaire à celui de Penly 1, qui est
concerné par cette corrosion. Et donc je n'ai pas encore d'informations
complémentaires à vous donner pour savoir s'il y aurait un impact ou non sur le
rythme et le calendrier des réparations. On attend d'avoir le retour précis.
Journaliste
Bonjour Monsieur le Ministre. KALBI [ph] pour Radio
Fréquence protestante. Après l'avis du ministre du Travail, Olivier DUSSOPT,
selon nos confrères de Libération, la permanence du président du Sénat a aussi
fait l'objet d'une coupure de courant hier dans l'après-midi. Craignez-vous une
multiplication de ces incidents, là, dans les jours à venir ? Et quelles
réponses le Gouvernement peut-il apporter ? Merci.
Olivier VÉRAN
D'abord, c'est rappeler que couper le courant,
volontairement, c'est illégal. Et donc il n'y a pas lieu de le faire. Ce n'est
pas la même chose que de faire grève ou de manifester. Ensuite, vous dire que,
quand vous coupez le courant, il y a des coûts qui sont engendrés par ces
coupures de courant et des coûts aussi pour remettre le courant. Il y a une
intervention humaine, mécanique et que ça a un coût, et que le coût, c'est les
contribuables qui les payent. Donc, nous demandons et nous nous attendons à ce
qu'il n'y ait pas de coupures de courant, que ce soit d'ailleurs dans un
tribunal comme j'ai eu l'occasion de le dire, dans une université, dans la
présidence du Sénat ou dans telle ou telle commune de France. C'est bon ?
Mathieu COACHE
Une petite dernière. Mathieu COACHE, ou avant-dernière
d’ailleurs, Mathieu COACHE, BFMTV. Peut-être votre réaction sur le ou les
doigts d'honneur, on n'a pas bien compris, du garde des Sceaux hier à
l'Assemblée... Pardon ? Un seul. Peut-être votre réaction là-dessus ?
Olivier VÉRAN
Il n’y a pas eu de doigts d’honneur, c’est un bras
d'honneur.
Mathieu COACHE
Un bras d'honneur, un doigt, enfin, ce n’est pas si… Enfin,
on ne sait plus ce qui est…
Olivier VÉRAN
J'ai appris qu'il fallait être précis, donc…
Mathieu COACHE
D’accord. Voilà, votre réaction là-dessus et est-ce que des
excuses suffisent ? Est-ce qu'il faut envisager une sanction peut-être ?
Olivier VÉRAN
J'ai eu l'occasion de m'exprimer ce matin en matinale.
D'autres collègues l'ont fait ce matin en disant qu’évidemment, on ne doit pas
faire de bras d'honneur dans l'hémicycle, que le ministre a très clairement
expliqué, et il s'en est excusé que ces gestes ne visaient pas un député en
particulier, mais qu'il était accompagné de paroles qu'il a prononcé, qui ne s'entendait
pas dans le micro, mais qui ont été entendues par les députés autour de lui où
il disait c'était un bras d'honneur à la présomption d'innocence suite à
l'intervention d'un parlementaire qui, manifestement, ne laissait pas une
frontière entre la présomption d'innocence et la culpabilité. Voilà.
Ania NUSSBAUM
Ania NUSSBAUM de Bloomberg. Et quelles sont vos attentes
pour la visite du Premier ministre britannique ce vendredi ?
Olivier VÉRAN
Mes attentes habituelles, je dirais, traditionnelles, c'est-à-dire
en matière de partenariat économique, social, culturel, des attentes, aussi, en
matière de partenariat sur les questions frontalières et sur les questions
d'immigration. Donc, c'est toujours un moment important lorsque des
responsables d'Etats voisins, qui ont des longues traditions d'amitié se
rencontrent. Après, on verra, il y aura l'occasion de communiquer quand la
visite sera effective.
Elizabeth PINEAU
Elizabeth PINEAU, de l'agence Reuters. Je voudrais juste
compléter la question de Mathieu COACHE. Est-ce que le président de la
République a fait une remarque sur l’attitude de Monsieur DUPOND-MORETTI ?
Olivier VÉRAN
Non, non. Il n'en a pas été question en Conseil des
ministres.
Elizabeth PINEAU
Merci.
Olivier VÉRAN
Je laisse la place à ma collègue Isabelle ROME, qui est
ministre déléguée en charge de l'égalité femmes hommes, qui va vous présenter
ce plan, je le dis, tout à fait fondamental, qui va nous accompagner pendant le
quinquennat. Isabelle, c’est à vous.
Isabelle ROME
Bonjour à toutes et à tous. Érigée, donc, pour la deuxième
fois grande cause du quinquennat par le président de la République, l'égalité
entre les femmes et les hommes est au cœur de notre pacte républicain.
Sous
l'impulsion du Président, d'importantes avancées ont été effectuées au cours de
ces dernières années. Mais en 2023, notre mobilisation doit rester pleine et
entière. Donc, sous l'autorité de la Première ministre, j'ai construit et
présenté ce jour en Conseil des ministres un plan qui orientera l'action de l'ensemble
des Ministères sur les quatre ans à venir. Il est articulé autour de 4 grands
axes : la lutte contre les violences faites aux femmes, la santé des femmes,
l'égalité économique et professionnelle, la culture de l'égalité. Le premier
est la lutte contre les violences faites aux femmes.
Beaucoup a été fait lors
du précédent quinquennat, notamment dans le cadre du Grenelle des violences
conjugales organisé en 2019 par le Gouvernement. Aujourd'hui, il faut assurer
une protection intégrale et immédiate des femmes, sur l'ensemble du territoire.
Dans chaque département, nous mettrons en place une structure médico-sociale de
prise en charge globale des femmes victimes de tout type de violences, avec
possibilité de déposer plainte. Chaque département sera doté d'un établissement
de santé permettant de recueillir et conserver des preuves même sans plainte de
la victime.
Par ailleurs, la complexité des
violences conjugales rend nécessaire leur traitement judiciaire spécifique.
C'est pourquoi, comme vous le savez, la Première ministre a confié une mission
à deux parlementaires, Emily CHANDLER et Dominique VERIEN, qui rendront leurs
conclusions fin mars. Mais de premières orientations peuvent d'ores et déjà
être données. La Première ministre l’a fait. Chaque juridiction sera dotée de
pôles spécialisés qui traiteront en transversalité des dossiers de violences
intrafamiliales sur le plan civil et sur le plan pénal et puis, une ordonnance
de protection immédiate, dans les 24 h, au bénéfice de la victime de violences
conjugales et ses enfants sera instaurée.
S'agissant des violences sexuelles,
nous voulons lutter contre le sentiment d'impunité. Les obstacles aux
poursuites devront être levés. Nous examinerons, avec le Garde des Sceaux, la
possibilité de proposer au Parlement la prolongation du délai de prescription
des infractions sexuelles commises sur une personne majeure, si le même auteur
commet un nouveau viol ou une nouvelle agression sexuelle sur une autre
personne. Le but est d'éviter que pour un même auteur, certaines infractions
soient prescrites et d'autres non. Les peines encourues seront aggravées en cas
de viols sériels. La santé des femmes constitue le deuxième axe du plan. Le
lancement de la stratégie nationale contre l'endométriose, il y a un an, a marqué
une étape clé pour la santé des femmes.
Mais nous devons aller plus loin en
matière de droits sexuels et reproductifs et notre plan prévoit de mieux
accompagner les femmes qui subissent une fausse couche en supprimant le délai
de carence en cas d'arrêt maladie consécutif à une fausse couche. Ce qui donc
permettra à ces femmes d'être indemnisées, dès le premier jour d'arrêt de
travail. Dans la continuité de l'annonce faite par le président de la
République, le 8 décembre 2022 sur les préservatifs masculins, les préservatifs
féminins seront gratuits en pharmacie sans ordonnance, pour les jeunes de moins
de 25 ans.
La lutte contre la précarité menstruelle sera poursuivie. Nous
permettrons le remboursement, par la Sécurité sociale, des protections
périodiques réutilisables pour les jeunes jusqu'à 25 ans inclus. Enfin, nous
doublerons le budget dédié à la lutte contre la précarité menstruelle pour
financer les projets portés par les associations à destination des femmes
précaires. L'accès des femmes à la santé sera également renforcé dans les
territoires, et notamment dans les zones rurales, par le déploiement de 30 bus
itinérants supplémentaires pour le dépistage de maladies cardio-vasculaires
et/ou gynécologiques.
Le troisième plan de cet axe est dédié à l'égalité
économique et professionnelle. Quelques exemples de mesures : nous
n’autoriserons l'accès aux marchés publics qu'aux entreprises respectant leurs
obligations en matière de publication de l'index égalité professionnelle, ou
qui ont obtenu une note suffisante de cet index. Celles qui n'auront pas fait
cela seront exclues. Index que nous déclinerons aux 3 versants de la fonction
publique. Nous développerons également le programme « une entrepreneure, une
mentor ou un mentor
» qui permettra aux créatrices d'entreprise d'avoir accès à
un ou une mentor en ligne gratuitement, pendant 1 à 2 ans. Nous soutiendrons
également les familles monoparentales qui bénéficient d'une revalorisation de
50 % de l’allocation de soutien familial. Lutter contre les stéréotypes est au
cœur du quatrième axe de ce plan, c’est la culture de l’égalité.
Pour lutter
durablement et sensiblement contre les violences sexuelles et sexistes, il est
indispensable que les séances d’éducation à la sexualité prévues par la loi
soient effectivement dispensées. Nous déploierons un plan de formation des
personnels et diffuserons des ressources pédagogiques qui faciliteront la mise
en œuvre de ces séances, et un suivi de la loi sera fait avec notamment la
publication de données quantitatives concernant la mise en œuvre de la loi. Il
faut aussi agir pour davantage de mixité au sein des filières d’avenir et
briser ce fameux plafond de verre. En ce sens, 10 000 jeunes femmes
bénéficieront d’un accompagnement global, y compris financier, pour intégrer
les métiers du numérique et de la tech.
Il paraît enfin nécessaire de
transmettre la mémoire de celles et ceux qui ont combattu pour l’égalité entre
les femmes et les hommes et de leur rendre hommage. Nous soutiendrons donc la
création d’un musée des féminismes, à Angers.
Ce plan est ambitieux, vous avez
pu le voir, il comporte plus d’une centaine de mesures. Il est nécessaire, il
changera la vie des femmes et j’irai moi-même le présenter sur l’ensemble des
territoires pour le présenter j’allais dire au grand public, avoir des réunions
avec l’ensemble de nos concitoyennes, de nos concitoyens et pouvoir dialoguer
sur ce plan et de recueillir aussi leurs observations, leurs attentes pour
toujours mieux l’adapter aux territoires. C'est à travers ces mesures et la prise
de conscience collective de toute la société que nous parviendrons enfin à
cette égalité réelle entre toutes et tous. Je vous remercie.
Journaliste
Madame la ministre, bonjour. J'aimerais avoir votre
sentiment : la présentation de ce plan en Conseil des ministres est quasi
concomitante après le rejet d'une proposition de loi d'Aurore BERGER, hier, à
l'Assemblée nationale, visant l'instauration d'une inéligibilité automatique.
Certains dans la majorité ont voté contre, vos alliés du MoDem ou de Horizon.
Quel est votre sentiment là dessus ? Est-ce que, finalement, il n'y a pas…
qualifier, je ne sais pas, c’est compliqué à dire, mais oui il y a une inadéquation
entre cette proposition et le rejet d’hier soir ? Merci beaucoup.
Isabelle ROME
Ce que je peux vous dire simplement, c'est que je regrette
que cette proposition n'ait pas été adoptée.
Journaliste
Très bien. Et sur… Alors, une deuxième question sur
l'égalité en entreprise, l'égalité salariale. Il a été question finalement de
récompenser les entreprises vertueuses qui appliquent, donc, cette égalité
salariale et il pourrait y avoir finalement des contraintes ou des mesures
mises en place pour finalement pointer du doigt celles qui ne respectent pas
cette égalité salariale, notamment en les privant de marchés publics. Est-ce
que vous pouvez juste éclaircir ce point ?
Isabelle ROME
Oui, tout à fait. Donc en fait, il s'agit d'exclure des
marchés publics, c'est-à-dire que lorsque l'État passe des commandes publiques,
de ne pas mettre, donc, sur le marché les entreprises qui ne publient pas leurs
résultats à l'index de l'égalité femmes-hommes ou qui n'ont pas une note
suffisante à cet index. Voilà, donc, c'est bien effectivement le principe de
l'exclusion dans ces cas là.
Journaliste
Bonjour, je rebondis juste sur la question. Quand vous
parlez de note suffisante, vous avez fixé un seuil, déjà ? C'est 75 ? 85 ?
Isabelle ROME
A priori, c'est 75, oui.
Journaliste
Très bien. Et juste ma question en ce qui concerne l'arrêt
de travail pour fausse couche, petite précision, est-ce que ça concerne
uniquement la femme qui a fait la fausse couche ou ça concerne également son ou
sa partenaire ?
Isabelle ROME
Alors pour l'arrêt de travail, c’est la femme. Mais sera
prévu aussi, et vous avez dû voir la proposition de loi portée notamment par
Sandrine JOSSO, un accompagnement psychologique qui, lui, pourra concerner la
femme et son conjoint, s'il le souhaite.
Journaliste
Donc, la suppression du jour de carence, c’est uniquement
pour la femme qui a perdu son enfant ?
Isabelle ROME
Oui.
Journaliste
Très bien merci.
Isabelle ROME
C’est bon ? Très bien.
Animatrice
Pas d’autres questions ? Merci à vous.